samedi 28 février 2009

En écoute cette semaine

Headless Heroes

The Silence Of Love


Headless Heroes est un projet né de l'association des deux producteurs Eddie Bezalel (Mark Ronson) et Hugo Nicholson (Radiohead, Bjork, Primal Scream), partant sur l'idée d'un album de reprises réunissant des morceaux n'ayant pas rencontré le succès qui leur incombait lors de leur sortie originale. Loin de se limiter à un genre spécifique, le disque regroupe des titres d'artistes hétéroclites de Vashti Bunyan à Nick Cave en passant par Daniel Johnston, The Jesus and Mary Chain ou I am Kloot. Restait à trouver l'artiste qui serait en mesure de redonner une seconde vie à ces petites perles oubliées et c'est à Alela Diane qu'échoit ce privilège. Celle-ci se retrouve donc incitée à sortir de son registre habituel pour s'aventurer vers des rivages plus pop et on n'a donc pas affaire à un album d'Alela Diane et son univers folk à proprement parler. On sent pourtant qu'elle a du plaisir à partager des morceaux qu'elle s'approprie tout en douceur alors que l'album fait preuve d'une belle homogénéité et propose une relecture élégante de morceaux qu'on a beaucoup de plaisir à découvrir ou redécouvrir.




Sinsemilia

En quête de sens


Le nouvel album de Sinsemilia vient de paraître et commence très fort ! Dès le premier titre « Feu de vie », le ton est donné : reggae et bonne humeur sont de la partie ! Avec treize morceaux tantôt accusateur et réaliste, tantôt nostalgique des premiers émois de la scène, Sinsemilia reste fidèle à lui-même ! Non sans humour comme sur le titre « Le retour des cowboys ». Le groupe grenoblois s’ouvre aussi de nouvelles portes pour exprimer ses envies et ses idées, sans jamais renier ses racines libertaires !
La voix grave de Mike se dévoile sous un jour différent, parlée sur « C’est déjà ça », chantée sur « Le silence ». Un morceau singulier dans le répertoire de Sinsemilia, tout comme l’interprétation piano-voix de « Dernier concert », titre qui referme ce magnifique CD où chaque morceau fait écho au titre « En quête de sens ». Leur sincérité, leur spontanéité et leur simplicité font encore une fois mouche. Un album qui rencontrera à n’en pas douter, un très beau succès !



Electrod

Monsieur Madame


Lumineux et morose, l'univers d'Electrod interpelle par ses sons libres qu'aucune étiquette musicale ne parvient à contenir, par ses textes débités en live comme des cris pour la vie. Les paroles écorchées s'apaisent au contact des mélodies portées par la trompette et la guitare, qui trottent dans la tête, longtemps. Tout en contraste, Electrod impose une énergie rock et pop à ses racines electro-jazz.

Electrod a depuis 2002 muté, cherché, avancé. En intégrant de nouveaux éléments (basse et batterie) et leurs influences, les trois acolytes de départ ont trouvé leurs semblables pour affirmer une identité et faire perdurer leur esprit défricheur. A cinq. Comme les doigts d'une main.
La Grande Sophie

Des vagues et des ruisseaux


La Grande Sophie adore chanter. Cela se sent dès les premières notes de son nouvel album, « Des vagues et des ruisseaux ». Elle nous invite à lâcher prise, pour mieux donner rendez-vous à l’émotion. Ses dix ans de parcours en chanson ont fait d’elle une artiste d’expérience qui n’a jamais aussi bien porté son nom. Sophie est devenue grande à force de travail bien sûr, mais aussi et surtout de mélodies accrocheuses, ici magnifiées par les arrangements d’Édith Fambuena, des ex-Valentins. « Ce jour-là », « Ta mauvaise foi », « Quand le mois d’avril » ou encore « Danser sur le disco »… ses chansons trottent dans la tête. À l’image de Quelqu’un d’autre au registre pop-folk et ses rêves d’une autre vie. Autant de lendemains qui dansent qu’elle s’apprête à partager sur scène, le lieu où elle se sent vivre.


Raphael Saadiq

The way I see it


Suave et pétillant, un hommage à l'âge d'or de la pop noire. So elegant !
Il suffit parfois d'une chanson. Celle-ci est particulièrement enlevée et tire l'album de Raphael Saadiq vers les sommets de l'élégance soul. C'est une complainte pour la Nouvelle-Orléans de l'après-Katrina (Big Easy), l'histoire toute simple d'un type qui cherche désespérément une fille dans les ténèbres d'une ville soufflée par l'ouragan. Les paroles lorgnent vers le blues des années 30, tout en citant le Marvin Gaye de 1970 (« Somebody tell me what's going wrong... »), et les arrangements tissent une dentelle légère dans la grande tradition swinguante du doo-wop et des Temptations première manière. Des souffles de fanfares décalées pimentent encore l'affaire et donnent à l'exercice de style des airs de mini-classique. Le reste de l'album vibre au diapason de cette perle rétro et rend hommage à l'âge d'or de la pop noire américaine, sans toucher au répertoire mais en revisitant l'ivresse de ses mélodies.
Raphael Saadiq, ancien leader de Tony ! Toni ! Toné ! puis de Lucy Pearl, a toujours été un producteur élégant et romantique. Il signe là un album de noceur idéalement taillé pour les fêtes. Pétillant, fervent, enjoué et malin, parfait pour sabrer le champagne à l'occasion du prochain cinquantenaire (janvier 2009) de la Tamla Motown.

Laurent Rigoulet
Télerama n° 3073 - 06 décembre 2008

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